Chaque mois, retrouvez dans “Les Inrockuptibles” le meilleur des expositions à voir dans le pays.
À Paris, Metz, Toulouse, Montreuil ou encore Ivry. Nous vous proposons de découvrir cinq expositions fascinantes qui invitent à la réflexion.
Apprendre à voir
Les tapisseries de l’une et les tableaux géométriques de l’autre apporteront une contribution essentielle à l’art du XXe siècle. Par leur géométrie aussi rigoureuse qu’élégante, Anni et Josef Albers comptent parmi les pionniers de l’art abstrait.
Pour la première fois en France, le Musée d’art moderne présente les œuvres du couple qui s’est rencontré au Bauhaus à Weimar en 1922. L’abolition de la frontière entre art et artisanat, telle que prônée par l’école, ils la prolongent à leur tour. Quittant l’Allemagne pour les États-Unis en 1933, la paire s’embarque dans l’aventure du Black Mountain College, l’école expérimentale qui bouleversera l’approche de l’art au cours des années suivantes.
Au fil d’un parcours chronologique de plus de 350 œuvres, peintures, photographies, meubles et textes, la pédagogie alternative fournit à l’exposition son fil rouge.
Anni et Josef Albers, L’Art et la vie, jusqu’au 9 janvier au Musée d’art moderne de Paris
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Fragments parlés
La matière que travaille Hanne Lippard, c’est la voix. La sienne, ce médium le plus immédiat qu’il soit donné à l’humain et que l’artiste norvégienne, née en 1984 et basée à Berlin, transpose en pièces sonores, performances et concerts.
Le texte aura toujours occupé une place de prédilection chez cette graphiste de formation. Mais par l’oralité, puisant aux sources de la poésie, du théâtre, de la musique et de la technologie, Hanne Lippard l’inscrit au plus près des corps.
Plus précisément, l’artiste aborde la voix par le prisme de la voix féminine telle que l’a standardisée la technologie : nos appareils connectés nous parlent avec un timbre genré, attaché à une économie digitale infusée d’un érotisme latent et d’une objectification tenace.
Hanne Lippard, Le Langage est une peau, jusqu’au 6 février au 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine à Metz
Onirisme calciné
Tous les ans à Toulouse se tient le Printemps de septembre. Déclinant ses 28 lieux à travers la ville et son voisinage, le festival fête en 2021 ses trente ans.
Son titre, Sur les cendres de l’hacienda, se place sous des auspices situationnistes : en 1958, Ivan Chtcheglov affirmait que cette hacienda, il fallait la construire. Depuis, la résistance frontale a cédé à un réalisme plus circonspect : non plus construire en dur, mais serpenter entre les ruines.
Sous la direction artistique de Christian Bernard, une cinquantaine d’artistes de toutes générations ont été invité·es à danser sur les cendres brûlantes. Parmi eux·elles, on trouvera Walid Raad, Lawrence Abu Hamdan, Miriam Cahn, Siah Armajani ou encore Kiki Kogelnik.
Le Printemps de septembre, du 17 septembre au 17 octobre à Toulouse
Regard sur la vie collective
Pour l’ultime volet de sa résidence à la Maison pop, le curateur Thomas Conchou s’est allié à l’artiste Lou Masduraud qu’il a invitée dans ce cadre.
Systm soupir présente en son cœur le résultat d’une année passée à arpenter Montreuil, son tissu institutionnel et ses lieux de pouvoir. Au gré de workshops, ce sont la mairie, l’école, la prison, la bibliothèque, modelés en céramique par les adhérent·es amateur·trices qui trônent au centre de l’espace.
Les fondations chancelantes de la vie collective instituées se prolongent à travers de diverses séries abordant la machinerie de la ville, ses soupiraux, ses bouches d’aérations, ses spectres, ses légendes et ses voies de traverse.
Lou Masduraud, Systm soupir, jusqu’au 11 décembre à la Maison pop à Montreuil
Cris et chuchotements
Il fut réalisateur, scénariste, acteur, militant, jardinier, icône queer. Derek Jarman (1942-1994) a traversé la seconde moitié du XXe siècle comme une traînée de poudre, auteur de longs métrages salués par la critique – dont Caravaggio (1986) ou Edward II (1991).
Mais Derek Jarman fut également, et on le sait moins, un plasticien prolifique. Au Crédac, sa pratique de la peinture, du collage et de l’assemblage éclate dans toute sa charge tumultueuse.
L’exposition se concentre sur la dernière partie de sa vie. Diagnostiqué séropositif, il a plongé, durant ces années-là, dans la création comme thérapie depuis sa maison Prospect Cottage dans le Kent jouxtant une centrale nucléaire – métaphore d’une survie en milieu post-apocalyptique, s’il en est.
Derek Jarman, Dead Souls Whisper (1986-1993), du 25 septembre au 19 décembre au Centre d’art contemporain d’Ivry – Le Crédac
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