Elle avait interprété Jeanne d’Arc dans l’un des chefs-d’œuvre de Robert Bresson. Son interprétation de la sainte, exempte de tout lyrisme, était incandescente. Florence Delay est décédée ce 1er juillet à 84 ans.
Académicienne et écrivaine (prix Femina pour Riche et légère en 1983), co-autrice avec le poète Jacques Roubaud d’un cycle de dix pièces intitulé Graal Théâtre, Florence Delay était la fille de l’académicien et écrivain (et psychanalyste) Jean Delay – il existe une petite place à son nom au fin fond du 13e arrondissement de Paris. Il se trouve que lorsqu’elle avait 20 ans, elle avait interprété Jeanne d’Arc dans l’un des plus beaux films de Robert Bresson, Procès de Jeanne d’Arc.
Dans un style évidemment différent de celui de Dreyer dans La Passion de Jeanne d’Arc (autre chef-d’œuvre – certains sujets sont immortels, sauf chez Luc Besson), Bresson y montrait, comme toujours dans une grande sobriété intense, une Jeanne certes empreinte de piété, mais beaucoup moins illuminée, extatique, moins sensuelle que celle que jouait la grande Falconetti, avec une passion, une emphase bouleversante chez Dreyer. On se souvient de Florence/Jeanne, assise sur un tabouret, répondant coup pour coup à ses tortionnaires juristes et théologiens, ou le contraire. Elle régnait. Ensuite, Florence Delay avait fait quelques apparitions dans quelques films plus discrets.
Il y a deux ans, on l’apercevait, un peu fuyante, dans son appartement de la rue Soufflot et dans le splendide film d’Alain Cavalier, L’Amitié, puisqu’elle était mariée au célèbre producteur Maurice Bernart – ami et producteur du cinéaste, décédé en février dernier. “Une femme me plaît parce qu’elle a joué dans un film de Bresson”, disait Alexandre (Léaud) dans La Maman et la Putain de Jean Eustache (Isabelle Weingarten jouait dans le film). Voilà.